gare-de-canfranc
Nous sommes au milieu du 19ème siècle, dans le Sud-Ouest de la France, département des Pyrénées-Atlantiques. L’idée d’unir par voie ferrée les deux versants français (Béarn) et Espagnol (Aragon) fut à l’origine de nombreuses tentatives infructueuses et de vains efforts.
De nombreuses objections s'élèvent à un tel projet, notamment en raison de l'existence d'une ligne France-Espagne sur la côte Basque, à quelques kilomètres de là, ouverte dès 1864.
L'obstacle majeur est bien entendu la traversée des Pyrénées qui représente un énorme défi.
Les travaux de construction démarrèrent en 1904 après la signature d'un traité France-Espagne. Ils marquèrent le franchissement d’une étape en ce qui concerne l’ingénierie ferroviaire.
Le rêve fut enfin réalisé. Le 18 Juillet 1928 fut célébrée en grande pompe l’inauguration en présence du Roi d'Espagne Alphonse XIII et du Président de la République Française, Gaston Doumergue.
Ce fut l’ouverture officielle de la gare internationale de Canfranc et du tunnel transfrontalier d’une longueur de 7875m! Le trafic ferroviaire reliait alors les villes de Pau et Saragosse via Oloron-Sainte-Marie (France), Canfranc, Jaca et Huesca (Espagne).
Plus de quatre-vingt ponts, vingt-quatre tunnels, quatre viaducs et d’énormes travaux de déforestation seront nécessaires pour passer la très escarpée et encaissée vallée d’Aspe (versant français).
Environ 50% du trajet sur ce même versant s’effectuait sur des ouvrages d’art en pierre de taille pour la plupart.
La ligne ne fut jamais vraiment rentable. La crise économique de 1929, un grave incendie en 1931 puis la guerre civile d’Espagne en 1936 condamne la ligne. Le tunnel transfrontalier est même muré pour se protéger de l’envahisseur français.
Mais en 1939 l’activité reprend, les allemands tirèrent opportunément profit de la liaison. La résistance dynamita même certains ponts côté français en 1944.
1948 marque une nouvelle reprise du trafic trans-pyrénéen. Sans être jamais rentable, la ligne survivra jusqu’au 27 mars 1970, jour où les freins d’un convoi de marchandises cédèrent, détruisant le pont de l’Estanguet. La rame termina son trajet dans le gave sans faire de victimes.
La SNCF ne jugea jamais nécessaire de rouvrir la ligne. L'accident fut un bon prétexte et les travaux estimés trop coûteux ne furent jamais entrepris.
2003 marqua l’achèvement de la construction du tunnel routier, sujet de nombreuses polémiques, après plus de 10 ans de travaux. Il clot sans doute tout espoir de reprise d’une éventuelle activité ferroviaire entre la Pau et Saragosse.
La construction de cet édifice dessiné par l’architecte Fernando Ramírez de Dampierre s’étala de 1921 à 1925. Une longueur totale de 241m, 75 portes sur chaque côté et « plus de fenêtres qu’il n’y a de jours dans l’année ». Ce sera la plus grande gare d’Europe lors de l’inauguration en 1928.
L’édifice principal est bordé par le quai français d’un côté et le quai espagnol de l’autre. Pour le style, il s’agit d’un mélange de classicisme et d’art nouveau d’influence française. Les matériaux employés pour la constructions furent ceux de l’époque : béton armé, verre, marbre et acier.
Si la longueur impressionnante du bâtiment surprend, celui-ci s’élève tout de même trois étages. Le toit est couvert d’ardoises et parsemé de petites lucarnes. Le hall central pour voyageurs étale la toute la magnificence possible. Plafonds de la hauteur des 3 étages, escaliers en marbre blanc, guichets en bois..
On trouvait aussi dans cette gare un hôtel international luxueux, des bureaux de douane, une infirmerie, bars et restaurants, des bureaux pour la SNCF et son équivalente espagnole, la RENFE.
L'attente était longue, les voyageurs méritaient un certain confort.
Jusqu'à 2005, ce lieu était ouvert à tous, taggeurs et casseurs, et devenait de plus en plus difficile d’identifier les derniers vestiges. Les dégradations étaient nombreuses, et le futur de la belle gare était malheureusement plus qu'incertain...
Heureusement, une rénovation a été entreprise de 2005 à 2007: la gare sera transformée en hôtel casino centre de loisirs de luxe.
- Le Project Canfranc: site magnifique (en Français) de deux photographes allemands. A lire: l'histoire de l'or nazi... - Le transpyrénéen Pau-Canfranc-Saragosse: l'histoire très complète et détaillée de la gare et de la ligne ferroviaire. Merci à son auteur pour l'utilisation de ses photos anciennes (tunnel hélicoïdal, photo de l'accident, et panneau d'arrêt 'temporaire' de la ligne).
Bonjour à tous, merci pour ce site très bien fait, mais malheureusement pas assez complet pour assouvir ma curiosité grandissante à ce sujet. ;-) J'ai fait connaissance, comme certaines personnes, de la gare de Canfranc au cours d'un reportage, je crois la chasse aux trésors, sur France 3, qui présentait merveilleusement cette réalisation de toute beauté. Je me suis épris pour cette gare et m'étais promis de m'y rendre pour la visiter, chose faite depuis cette semaine, mais avec un immense regret de ne pouvoir la visiter car fermée au public pour réhabilitation. Un sentiment étrange, mélé de nostalgie, regret, tristesse, joie, pour cette étrange construction située au milieu de nulle part. Nostalgie, car nos anciens ont travaillé tellement dur pou accomplir cette oeuvre, regret de ne pouvoir entrer à l'intérieur et faire connaissance avec cette grande dame au coeur meurtri, tristesse de ne jamais plus pouvoir la voir dans son état originel, joie de la voir renaitre de ses cendres et au centre de toutes ces attentions. Heuresement, des pasionnés avant moi ont eu la chance de pouvoir entrer au coeur de cette beauté et nous en rapporter de si beaux clichés, nourissant mon imagination frustrée de n'avoir pu prendre ces photos moi-même. Lors de mon départ, j'ai pris rendez-vous avec cette vieille dame pour repasser la voir après sa restauration, et pourquoi pas ne pas compter parmis les premiers clients de l'hotel ? Sur le parcours ferré, abandonné, j'ai également eu un coup de foudre pour cette voie magnifique, parsemée d'ouvrages d'art, de gares, eux aussi désaffectés et oubliés, livrés à la nature. Je me suis approché de l'entrée française du tunnel aux forges d'Abel, et là encore, comme du côté espagnol, l'entrée est strictement interdite et pire encore, les rails ont été complétement recouverts de béton, laissant le tunnel en une sorte d'entrepôt sordide. La totalité des bâtiments ferroviaires et voisins ont été mis à sac et oubliés alors qu'un projet touristique pourrait permettre de sauver ce patrimoine en réhabilitant toutes ces structures. L'idée innocente d'un vélorail ne serait pas un bon projet? certaines régions en ont déjà eu l'idée, (en Vendée d'ailleurs), et permettrait de sauvegarder la voie en état ainsi que les installations, agissant ainsi comme un levier touristique. Je m'égare sur ce sujet car d'autres avant moi auront du y penser. Je ne pourrais me résigner à voir ce patrimoine mourir sans avoir ajouté ma pierre à l'édificice du sauvetage de cette histoire. Excusez ma longueur, mais je suis heureux d'avoir trouvé des gens pour qui compte cette histoire humaine et industrielle. David
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